Discours de notre maire André Rocchi.
Le 8 mai 1945, les Alliés signaient l’acte de capitulation de l’Allemagne nazie. Le représentant de la France lors de cette signature était le Général de Lattre de Tassigny, dont la devise personnelle — « Ne pas subir » — résonne encore aujourd’hui. Il fit immédiatement ajouter le drapeau français aux étendards alliés, étrangement oublié, réaffirmant ainsi la place de notre nation dans la victoire.
Nous sommes réunis aujourd’hui, dans notre paisible commune de Prunelli di Fium’Orbu, pour commémorer le 80e anniversaire de cette date historique — un jalon majeur de notre mémoire collective. Le 8 mai 1945 symbolise la victoire de la liberté sur l’oppression, de la justice sur la barbarie, de l’humanité sur l’abîme.
J’ai une pensée émue pour tous ceux qui, avec le courage de leurs convictions, ont risqué — et souvent donné — leur vie pour libérer leur pays. Ces héros, qu’ils soient anonymes ou reconnus, résistants, soldats, déportés ou civils, sont notre héritage commun. Ils ont sacrifié leur existence pour que nous puissions vivre libres. À nous, désormais, de faire vivre leur mémoire, de nous en inspirer pour bâtir notre présent, notre avenir et celui de nos enfants.
Nous leur devons respect, gratitude et admiration. Leur combat nous rappelle combien la paix est fragile, combien la solidarité entre les peuples est indispensable, et combien la tolérance et la compréhension doivent guider nos choix.
Notre société traverse une période de profondes mutations : révolution numérique, bouleversements écologiques, incertitudes géopolitiques. Trop souvent, notre époque semble ne vivre que dans l’instant, oubliant les leçons du passé. Or, ignorer le chemin douloureux menant à la liberté, c’est renier l’histoire et les ressources qu’elle nous offre. C’est risquer de nous perdre.
« Si un jour, on ne comprend plus comment un homme a pu donner sa vie pour quelque chose qui le dépasse, ce sera la fin d’un monde — peut-être même la fin d’une civilisation. »
Je vous invite, aujourd’hui, à prendre un moment pour la réflexion. À vous interroger : au-delà de nos préoccupations quotidiennes, reste-t-il en chacun de nous une part d’âme capable de placer la paix, la liberté et la justice au-dessus de nos intérêts personnels ? Sommes-nous encore prêts à agir, ou au moins à prendre position, pour que la paix reste celle d’un monde libre, et non d’une paix achetée au prix de la soumission ?
Regardons vers l’Ukraine, où la paix se monnaye contre des terres rares, où les libertés fondamentales sont menacées, où l’on doit choisir entre la violence autoritaire et un capitalisme déshumanisé. Ce dilemme tragique révèle les dérives d’un monde déséquilibré, où la morale se plie trop souvent aux intérêts économiques ou idéologiques.
En acceptant cela comme de simples compromis, nous devenons les complices d’un esclavagisme moderne. Que cela nous serve, au minimum, de leçon. Une leçon d’humanité, mais surtout de vigilance.
Vigilance face aux discours des « maîtres du monde », dont la légitimité repose souvent sur la glorification de soi-même.
En France aussi, les défis sont grands : lutter contre l’antisémitisme, contre toutes les formes de haine, préserver l’unité autour de nos valeurs communes. Ici, à Prunelli, nous agissons à notre manière, avec ténacité : par l’éducation, la transmission, la culture, et chaque geste de fraternité accompli au quotidien.
Je souhaite aujourd’hui saluer chaleureusement Michel Vidal, qui préside pour la première fois cette commémoration en tant que Président des Anciens Combattants de la section Fium’Orbu. Cher Michel, vous incarnez la continuité de la mémoire vivante. Votre engagement sera précieux. Vous êtes à votre tour un passeur de mémoire et nous vous remercions d’accepter de porter cette flamme avec ferveur.
Que cette journée ne soit pas seulement tournée vers le passé, mais qu’elle inspire un élan vers demain. Dans une époque aussi troublée, souvenons-nous que les chemins les plus justes sont ceux de la liberté, de l’égalité, de la fraternité. Ces valeurs ne sont et ne seront jamais totalement acquises. Elles doivent être sans cesse défendues, ravivées, transmises.
Ne laissons jamais notre dignité être mise en cause — ni celle de chacun, ni celle de notre peuple. C’est une valeur sans prix, qui appelle un respect absolu.
Transmettons à nos enfants non seulement le récit de l’Histoire, mais aussi la force de croire en un monde meilleur. La foi qu’un avenir juste est possible si nous nous engageons, au lieu de subir. La foi dans une société à construire, fondée sur un esprit universel de justice — une justice qu’il faut défendre, et parfois conquérir.
Vive l’Europe libre, vive la République, vive la France, vive la paix, vive la Corse et vive Prunelli di Fium’Orbu.
Je vous remercie de votre attention et vous invite tous à nous retrouver à l’aérodrome de Ghisonaccia pour un événement exceptionnel à partir de 13h.
